« Sur le kérosène, il n’y a pas de taxe. Et pire ! Il n’y a même pas la TVA », assurait Nicole Ferroni sur France Inter, le 7 novembre 2018. Une affirmation avérée.
« Parmi les quatre transports que sont l’avion, le paquebot, les trains et les voitures, lesquels luttent particulièrement contre le climat en augmentant pollution et thermostat ? ». Le 7 novembre sur France Inter, l’humoriste Nicole Ferroni ironisait sur l’augmentation de la taxe carbone annoncée par le gouvernement. Elle confronte la pollution des modes de transports avec les taxes qui lui sont associées. Elle affirme alors « Sur le kérosène […], il n’y a pas de taxe. Et pire ! Il n’y a même pas la TVA ». Et elle a raison.
Pas de taxe à cause d’une convention de 1944
L’aviation jouit d’un statut spécial en vertu d’une convention internationale sur l’aviation civile de 1944. Signée à Chicago par 52 États, cette convention impose, à l’article 24, l’exonération de taxes sur le carburant des avions dans les pays d’arrivée. Si en France l’article 265 du code des douanes fixe une taxe sur le carburant d’avion à 39,79 euros l’hectolitre, l‘article 265 bis l’exonère de cette même taxe, conformément à la convention internationale. Ainsi le kérosène, carburant le plus utilisé dans les avions n’est pas soumis à la TICPE (Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques).
Le carburant pourrait être taxé sur les vols nationaux
La France a perdu 580 à 820 millions d’euros à cause de ce système dérogatoire en 2011 selon un rapport du cabinet d’expertise néerlandais indépendant CE Delft commandé par Réseau Action Climat (fédération de 22 associations environnementales françaises). Cette année encore, quelques députés ont remis le sujet sur la table lors du projet de loi de Finances à l’Assemblée. Ils proposent d’abandonner cette exemption, notamment sur les vols intérieurs. Une mesure qui ne contreviendrait pas à la convention internationale.
Dans une directive européenne de 2003 qui fixe la politique énergétique de l’Europe , rien n’indique que les Etats ne puissent pas taxer le kérosène sur les vols intérieurs. La Suisse et les Pays-Bas appliquent déjà une taxe sur le carburant sur les vols nationaux.
Au niveau européen, les émissions de gaz à effet de serre sont taxées par un système de quotas d’émissions. Mais l’Union Européenne n’a pas soumis les vols en provenance ou à destination de l’extérieur à ces quotas. Le rapport du CE Delft estime que les taxes ne sont effectives que sur 18% des émissions de gaz à effet de serre de l’avion.
L’avion émet 45 fois plus de CO2 que le TGV
Pourtant en terme de gaz à effet de serre, l’avion est le transport le plus polluant. Selon l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), sur un trajet national, l’avion consomme 1,7 fois plus que la voiture, et 2,5 fois plus que l’autocar. Pour le TGV, le ratio est encore plus impressionnant : 45 fois plus d’émissions de CO2. Or, contrairement à l’avion, des taxes existent sur l’énergie utilisée dans ces autres modes de transport. Le carburant de la voiture et de l’autocar supporte la TICPE, mais également la TVA à taux plein (sur le produit hors taxes et sur la TICPE). Quant au train, c’est sur l’électricité qu’il y a des taxes : la TVA et la TICFE (Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité) à taux réduit.

L’aviation civile soumise à des taxes spécifiques en FranceSi le carburant des avions n’est pas taxé, le transport des passagers l’est. Mais là encore, pour l’aviation, les règles sont assouplies. Le code général des impôts français stipule que la taxe sur la valeur ajoutée ne s’applique pas aux transports aériens sur les vols internationaux. Sur les lignes nationales, la TVA n’est que de 10% (le taux normal est de 20%). Quatre autres taxes nationales pèsent toutefois sur le secteur aérien commercial, mais aucune d’elles ne sont dédiées à la transition écologique. Sur les passagers, les compagnies de transport aérien paient une taxe sur l’aviation civile destinée au budget général de l’Etat. La taxe de solidarité dite « Chirac » est reversée au Fonds de solidarité pour le développement. La taxe d’aéroport est affectée aux aéroports pour le financement de matériel de contrôle. Enfin, la taxe sur les nuisances sonores aide les aéroports à payer les indemnités des riverains. |
C. Ben Hamida, C. Brégand, J. Le Tellier, C. Mollereau, D. Regny, C. Robert-Motta