Fact Check

En période électorale, les candidats fortunés ont ils un avantage grâce à Facebook ?

Lors des élections, certains candidats achètent des publicités sur Facebook pour augmenter la visibilité de leurs publications. Une action considérée, par certains, comme une obligation pour prendre l’avantage sur une élection.

“Le fonctionnement de Facebook est simple : plus vous dépensez d’argent, plus le public que vous atteignez est large. Pour 10 euros, la publication touche 30 000 personnes, pour 100 euros, ce sont 300 000 personnes. Celui qui a le plus gros portefeuille a toutes les chances de son côté.”

José Bové Eurodéputé Vert, 14 Décembre, Libération

Les réseaux sociaux sont devenus des outils incontournables durant les périodes électorales. La promotion de contenus proposée par Facebook peut parfois constituer une atteinte à l’égalité de la visibilité des différents partis. Dans sa tribune, M. José Bové avance trois affirmations. Selon lui, plus un utilisateur dépense d’argent pour mettre en avant un contenu sur Facebook, plus le public atteint est large. L’eurodéputé suppose aussi que la relation est linéaire (que la portée de vues supplémentaires est proportionnelle au montant dépensé), et que le candidat qui a le plus d’argent a le plus de chances de son côté en période électorale. Dans cette tribune, José Bové ne cite pas de source, il ne sera pas possible de discuter des chiffres avancés, mais de la relation linéaire qu’ils impliquent.

Payer pour augmenter la visibilité

Les deux premières informations sont très rapidement vérifiables. En faisant le test sur deux pages Facebook ayant respectivement 49 000 et 1 000 abonnés, Facebook propose de payer pour augmenter la visibilité de contenu et estime la portée des vues supplémentaires par jour (voir les graphiques ci-dessous). Le réseau social indique une fourchette de personnes qui seraient atteintes par la promotion d’un contenu. Par exemple, pour 100 € sur une page de 1 000 abonnés, la visibilité peut être augmentée entre 31 000 et 200 000 personnes.

Les deux graphiques révèlent que plus le montant dépensé est important, plus la portée supplémentaire du contenu est importante, confirmant le premier propos de M. Bové. En revanche, la seconde affirmation est fausse : la relation entre le prix et la portée semble plus logarithmique que linéaire. En effet, les courbes simulées ne correspondent à des lignes droites (linéaires) mais à des courbes incurvées, la portée supplémentaire ne serait pas proportionnelle au prix de l’accélérateur, infirmant les propos de M. Bové.

L’argent ne serait pas un facteur unique

Pour vérifier l’affirmation “celui qui a le plus gros portefeuille a le plus de chance de son côté” (en période électorale), il faut comparer les portées moyennes supplémentaires entre les différentes pages en fonction du montant de la mise en avant.

Le premier graphique compare deux pages de popularité largement différente (49 000 abonnés contre 1 000) et le deuxième graphique compare deux pages de popularité proche (1 000 contre 1 900).

Pour un même montant, la portée diffère largement entre celle à 49 000 abonnés et celle à 1 000. L’argent ne serait donc pas un facteur unique, d’autres entreraient en compte. La popularité de la page avant investissement influera sur le résultat. Il existe également une part d’aléatoire : selon le type de contenu, l’heure de sa diffusion, et les tendances du moment, elle sera plus ou moins relayée par le public.

Le deuxième graphique montre qu’entre deux pages d’une popularité proche, les différences sont négligeables. L’affirmation de José Bové concernerait donc les pages de popularité équivalente, et dans cette situation, celui qui a le plus d’argent a le plus de chances de visibilité de son côté.

L’argent utilisé sur Facebook permet-il de gagner des élections ? C’est la question qui se pose pour l’Europe.

 

H. Linossier, R. Lizée, A. Gasqueres, N. Sonalier, M. Andriambelo, S. Barry