En Mars 2018, Breizh Info consacre un article à un rapport de la Banque Mondiale sur les migrations climatiques en 2050 en omettant de préciser le caractère interne de ces dernières
Enjeu majeur du XXIe siècle, le réchauffement climatique est et sera à l’origine de déplacements de millions de personnes. Face à l’ampleur de ces estimations, beaucoup s’alarment d’arrivées massives et déstabilisatrices en Europe.
C’est le cas du site d’opinions Breizh Info, qui mentionne que «143 millions d’ immigrés climatiques» seraient attendus en 2050 selon la Banque mondiale». Titré «Des dizaines et des dizaines de millions d’individus d’Afrique Subsaharienne et du Moyen-Orient vont venir en Europe», l’article date du 21 mars 2018 et fait référence au rapport «Groundswell : se préparer aux migrations climatiques internes» de la Banque mondiale, paru 2 jours avant.
Capture du titre et du début d’article sur le site Breizh-Info.
Des chiffres officiels sortis de leur contexte
Le rapport indique bien que «le changement climatique pourrait forcer plus de 143 millions de personnes à se déplacer». Toutefois, il ne s’agit pas de migrations internationales, mais de déplacements «à l’intérieur de leur pays d’ici à 2050, soit 86 millions de migrants internes d’Afrique subsaharienne, 40 millions de migrants internes d’Asie du Sud et 17 millions de migrants internes d’Amérique Latine». Au cours de l’article, l’auteur affirme que ces déplacés se rendront «principalement vers des régions voisines» certes, «mais aussi vers notre continent». Le chiffre cité par Breizh Info ne concerne pas l’Europe comme il le sous-entend.
Influencer le lecteur avec l’idée (fausse) que ces nouveaux flux migratoires menacent l’Europe
De la même façon, l’auteur, sans expliquer le sens de sa démarche, compare les 86 millions de migrants estimés pour l’Afrique subsaharienne à la population européenne, évaluée à 500 millions, alors qu’elle est actuellement de 750 millions. Ceci pour influencer le lecteur avec l’idée (fausse) que ces nouveaux flux migratoires menacent l’Europe.
Au terme de migrants climatiques utilisé dans le rapport de la Banque mondiale, Breizh Info oppose le terme «réfugié», impropre juridiquement lorsqu’il est question de migrations climatiques, au terme «migrant». Il est notamment choisi pour comparer les réfugiés climatiques à la figure du réfugié syrien, tel un nouvel «argument mis en avant pour faire avaler la pilule de l’immigration aux Européens». Un point à relativiser quand on voit que, selon François Héran interviewé par Laure Cailloce dans CNRS Le journal, l’Europe a accueilli en 3 ans (de 2015 à 2017) environ 1 million de personnes réfugiées ou demandeuses d’asile, dont seulement 4% de Syriens en France.
S. Collignon, M. Fiachetti, L. Juzdzewski, S. Lavigne, J. Ollivier, W. Poutrain.